When was the last time you did something for the first time?

Impossible de manquer le grand marché indigène de Chichicastenango! C’est là-bas que je me suis rendu compte que le Guatemala n’est en fait vraiment pas très touristique (ce qui rend ce pays si génial). Le marché est pourtant présenté comme une visite indispensable dans les guides de voyage, mais il s’est avéré que très peu de touristes font le détour. Grave erreur, mais tant mieux pour moi !

En route avec Giorgia et Felice !

J’avais réussi à m’y dénicher une petite chambre dans un hôtel qui était censé être un peu miteux, et quand j’ai su que les deux italien-nes ayant fait le trek du volcan avec moi n’avait pas trouvé de chambre, je leur ai filé le bon plan. Ainsi, nous nous sommes retrouvés à voyager ensemble, et nous n’allions pas nous quitter pour plus d’une semaine! Ça se passe souvent comme ça, pendant un voyage. Spontanément et naturellement.

A Chichi, toute une magnifique fresque sur les droits humains et des peuples indigènes

Le schéma typique des “mochileros/as” (magnifique terme espagnol pour dire routard, mais en moins désuet, venant du mot “mochila” soit sac à dos), c’est qu’on réserve sa chambre en dortoir ou chez l’habitant-e, de ville en village et de jour en jour, en principe en choisissant l’option la moins chère sur booking.com. Quand quelqu’un-e nous raconte qu’un truc vaut le détour, on l’insère dans nos plans. Certaines personnes n’ont même pas d’idée générale d’à quoi ressemble leur semaine en cours avant qu’elle se déroule sous leurs yeux!

Et le prix de la tombe de meilleur goût au cimetière revient à…

C’est toujours fascinant d’entendre tous les récits de voyage des autres, si variés, et de rencontrer des personnes de partout (principalement occidentaux…) qui ont aussi faim de découvrir les beautés de ce monde. Toutes les rencontres ne sont pas inoubliables, on ne “clique” pas avec tout le monde, mais après une première semaine de voyage j’avais déjà rencontré de très belles personnes. Le contact est naturel et agréable, les échanges tout de suite très profonds et vrais. C’est l’état de calme dans lequel nous met le voyage et toutes les incertitudes organisationnelles qui l’accompagnement qui causent un relâchement permettant de se rapprocher de ce qui compte vraiment et creuser au fond de nous-mêmes. Ce qui fait qu’on peut se montrer tel-le qu’on est et voir certaines très belles facettes des gens. D’ailleurs, il est plutôt commun de passer du temps avec de nouvelles personnes, tout savoir de leur voyage, pays d’origine, programme, intérêts, préférences et… de ne pas connaître leur nom ou profession! Certaines choses comptent plus que d’autres, et c’est aussi beau d’être hors de la société à ce point, au point de s’intéresser même à d’autres choses que d’habitude. Parfois, un coup de foudre d’amitié nous prend avec des gens qu’on connaît à peine. Parce que la vibe est bonne et qu’on se trouve pile sur la même longueur d’ondes à ce moment précis.

Marché à Chichi

C’est ce qui m’est arrivé avec Felice et Giorgia, où le contact est si naturel qu’on était juste parfaitement bien ensemble. Tant que nous désirions aller dans les mêmes endroits, nous avons fait ce bout de chemin en commun. Nous partageons une même curiosité, voire une passion pour la recherche de l’authenticité d’un pays, de la vérité et de la réalité de la vie ici – même si on se concède parfois aussi des moments plus classiquement touristiques. Chichicastenango est donc très bien tombé! Depuis Antigua, nous avons pris les bus locaux pour arriver dans cette bourgade plus en altitude. Il a fallu plusieurs correspondances pour y arriver, mais nous fûmes enchanté-es dès le début!

Préparation du marché la veille au soir
Vêtements traditionnels de la région, au marché à Chichi

Notre hôtel n’était en fait pas du tout miteux, et il était même parfaitement situé au coeur du marché – qui se tient tous les jeudis et dimanches, mais il est recommandé d’arriver la veille pour pouvoir en profiter dès les premières heures. Quand il n’y a encore aucun touriste et que les marchand-es installent leurs stands, dans le calme du matin. Après une journée de déplacement plutôt intense le samedi, nous sommes partis nous balader dans ce petit village, qui est clairement très peu visité par les Occidentaux. Tout ce qui se trouve à une fonction selon les besoins des locaux, rien de rutilant ou de faux pour nous rendre la visite plus confortable. On y voit donc la vraie vie des personnes du coin, sans artifice, et avec ce que ça comporte aussi de joyeux chaos, de saleté, de pauvreté, et aussi d’inattendu. En effet, nous avions à peine commencé à nous balader dans les rues que nous avons entendu de la musique et des voix s’échapper de ce qui était censé être un parking couvert. Nous avons jeté un œil et les personnes en marge de l’événement nous ont silencieusement encouragé à entrer et observer. Je n’en croyais pas mes yeux: nous étions tombé-es sur un défilé de mode traditionnelle indigène !

Défilé de mode traditionnelle

Ce fut autant “fait maison” mais pris très au sérieux en même temps qu’on peut s’imaginer avec les moyens du bord. C’est-à-dire que les murs du parking étaient recouverts d’un tissu décoratif blanc et soyeux, ainsi que les chaises en plastique du public. Un espace était aménagé pour que les modèles puissent marcher au milieu de la pièce et présenter les produits qu’iels portaient, et en guise de scène il y avait une affiche géante de la marque qui présentait ses pièces. Un homme et une femme faisaient la présentation en espagnol avec interprétation simultanée dans la langue indigène locale (le “quiché”). Et le tout était retransmis en live sur les réseaux sociaux. La salle n’était qu’à demi pleine, mais on sentait la fierté des gens à voir leur artisanat mis en avant de la sorte, et parallèlement on les sentais aussi assez amusé-es de l’incongruité de la situation.

Défilé de mode

Notre arrivée n’est pas passée inaperçue! Nous n’étions clairement pas le public cible, cet événement était par des localaux et pour des localaux. Mais tout le monde semblait ravi de nous voir montrer de l’intérêt pour leur artisanat, et on nous a clairement filmé dans les vidéos live! Je précise tout de même que je portais probablement mes vêtements les moins soignés possible, c’est-à-dire que j’étais tout de même en training et pull à capuche pour ce grand événement. Entre deux passages de présentations de tenues, un groupe de danse local amateur a fait quelques performances en tenue traditionnelle et avec de l’encens. Ce défilé est une des anecdotes que j’aime vraiment beaucoup de ce voyage !

Marché de Chichi

Le lendemain matin nous sommes donc arrivés au fameux marché relativement tôt. Quelle expérience ! Là aussi, nous n’étions pas le public cible. Au point que la plupart des marchand-es ne nous considérait même pas et ne s’adressait pas à nous. Un marché par elleux, pour elleux. Des indigènes de toute la région amènent leurs produits durant les jours de commerce, iels s’installent en prenant leur temps. C’est le plus grand marché de ce genre du pays, il est donc unique au monde. Un petit bijou. Parmi les étals on trouve des fruits et légumes, du riz et des haricots, des femmes qui tapent de la pâte dans leurs mains avant de la lancer sur une grande plaque chauffante afin d’en faire des tortillas, de la viande en grande quantité, des espaces restaurant, des fleurs, des animaux vivants (notamment des dindons tenus tête en bas par les pattes), des objets du quotidien de toutes sortes et… des vêtements traditionnels, beaucoup ! Parce qu’une fabuleuse particularité du Guatemala, et ce qui montre son authenticité encore très marquée et la preuve que le tourisme de masse l’a encore bien épargné, c’est que beaucoup de femmes portent encore leurs délicates tenues traditionnelles au quotidien. Ce n’est pas pour le plaisir des gringos/as, c’est leur vie normale, qui sous de nombreux aspects n’a pas encore souffert trop d’influence de la globalisation. Après avoir peu apprécié les aspects très faux d’Antigua, désormais remplie d’expats et taillée pour les touristes (des restaurants hors des moyens des localaux , servant des plats qu’iels ne mangent pas), Chichicastenango fut une sacrée bouffée d’air frais!

Clap clap clap clap font les tortillas de maïs jaune ou violet dans les mains de la cuisinière

Comme ce fut magnifique, de déambuler au hasard parmi les stands et admirer tout ce qu’ils offrent! Nous naviguions au milieu d’une foule dont la hauteur moyenne était pratiquement d’une tête plus basse que nous, ce qui nous permettait de confirmer que nous étions en effet les seul-es étranger-es. Et même quand est arrivé l’horaire des touristes (vers 10h, quand les bus arrivent d’ailleurs), nous devions être une quinzaine ou vingtaine tout au plus parmi des centaines de locaux ! J’ai tout de même profité de ce passage au marché pour faire quelques emplettes d’artisanat local, des objets que je vais emporter avec moi et chérir à chaque utilisation. Je déteste fortement négocier, bien que ce soit ici dans les usages, mais par chance Giorgia était là pour me conseiller et Felice pour jouer le jeu de la négociation des prix, avec brio. Il est tout de même italien, après tout.

Cérémonie à l’encens et aux bougies brûlées au cimetière

Un moment, nous nous sommes assis-es à un restaurant au cœur du marché et avons passé commande auprès des femmes qui cuisinaient. C’est là qu’a commencé ce que Giorgia et Felice appellent l’épisode Netflix de notre journée, c’est-à-dire le moment où on prend le temps d’observer ce qui se passe autour de nous et de savourer les scènes du quotidien qui se jouent naturellement. On est posé-es et la vie se déroule littéralement sous nos yeux. Ce fut merveilleux ! Il a fallu près d’une heure pour que nous soyons servi-es, alors que nous étions pratiquement les seul-es client-es et que nous avions juste commandé une soupe. Plus que la patience, on apprend le lâcher-prise.

Épisode Netflix au marché, en attendant notre repas

C’est une des leçons que les pays non-occidentaux ont à nos enseigner. Prendre le temps, savourer les moments, et surtout ralentir le rythme. En Amérique latine, notamment au Guatemala, on marche lentement, on ne se hâte pas, personne n’est stressé-e. A part, sans qu’on puisse expliquer pourquoi, lorsqu’il s’agit de prendre un bus (cf article précédent). Mais, hormis cette exception, le pays fonctionne au ralenti. Je doute qu’il y ait beaucoup de cas de burn-out par ici. Chez nous, ils sont devenus si normaux qu’on s’attend plus ou moins toutes et tous à en vivre un, une fois dans notre vie. C’est normal de devoir aller chez le psy parce que notre santé mentale n’est pas au top. Et pourtant, nous vivons dans des pays extrêmement riches ! Ici, il y a bien sûr d’autres problèmes. Mais c’est une chance d’échapper à cette folie frénétique de la surproductivité et de l’extrême efficacité, qui sont notre dystopique normalité. Comme occidentalaux, on s’adapte ici par immersion. Il faut toujours attendre, et c’est tant mieux. On est forcé-es à se calmer un peu, à se poser, et à mesurer l’ampleur du décalage. C’est aussi agréable, de voir que cest possible de vivre autrement.

Un peu de patience et on finirait par être servi-es

C’est d’ailleurs toujours ça qui m’a fascinée dans le voyage. Observer comment on peut vivre autrement, ailleurs. Toutes les choses qu’on peut faire différemment, qu’on ne s’imaginerait même pas. Remettre nos normes et habitudes mentales en question. Certes on sent la pauvreté, mais on perçoit aussi à quel point nos cultures sont profondément individualistes, l’un des nombreux drames du capitalisme. Le sens de communauté et de solidarité qu’on a perdu (qu’on nous a arraché, plutôt) dans le monde occidental est une richesse perdue dont on ne peut estimer la valeur. On le comprend en se rendant compte de la beauté du contact humain qu’on peut vivre ici avec des personnes dont le quotidien est des centaines de fois plus simple que le nôtre, et qui expriment joie et gentillesse plutôt qu’amertume et envie.

Boucherie à Chichi
Qui veut aller chez le dentiste à Chichi?

Après “Chichi”, nous nous sommes dirigé-es vers le lac Atitlan, à nouveau en bus collectifs. Atitlan, un autre petit joyau de l’Amérique centrale ! Merveilleuse étendue d’eau entourée par rien de moins que des volcans et une nature tropicale pleine d’enchantements. Nous y avons passé quelques jours, car l’ambiance y était si relaxante et le climat agréable que cela invitait à se poser. Notre hôtel avait une terrasse avec vue sur le lac et des hamacs, nous y avons passé de douces soirées en quête du meilleur repas du coin et à parler de tout et de rien, mais surtout de voyage et de nourriture (n’oublions pas que mes partenaires de voyage viennent d’Italie !). Les problèmes du quotidien n’existent plus, le travail est si loin que c’est pratiquement comme si je n’allais jamais y retourner. A Atitlan, pas de grosse randonnée pour nous mais avec une magnifique promenade entre les villages du tour du lac.

Arrivée à Atitlan
Lago Atitlan
Depuis le bateau

Nous avons pris le bateau jusqu’au village en face du nôtre, et de là nous sommes passés de l’un à l’autre en suivant le sentier dans la foret aux allures de jungle, avec en prime des vues à couper le souffle sur les volcans d’en face. Quant aux villages, puisqu’on avait lu qu’ils étaient “traditionnels” on s’attendait à y trouver de nombreux touristes et autant d’échoppes à leur intention, un peu comme le village dans lequel était notre hôtel. Pourtant, s’ils n’étaient pas extrêmement traditionnels en soi, ils étaient par contre 100% authentiques et très peu touristiques, dans certains minuscules villages on parle même 4 langues différentes. On y a vu les gens y vivre leur vie presque comme si le reste du monde n’existait pas. Cela signifie apercevoir beaucoup de femmes travailler et d’hommes ivres traîner dans les rues (on observe au Guatemala une forte répartition genrée du travail, d’ailleurs) mais aussi par exemple la joie de voir des files jouant au foot sur une place de sport, occupant ainsi l’espace public d’habitude si masculin, pour mon plus grand bonheur !

Petite terrasse sympa
Vue depuis la terrasse
Normal de voir un volcan au bout de la rue…
Encore des tortillas comme ça svp

On a compris par la suite que si on était pour ainsi dire les seuls touristes à nous balader de la sorte, c’est parce que la plupart des occidentalaux (et israélien-nes) qui viennent prennent leur quartier dans une jolie auberge de jeunesse pour ensuite ne pratiquement plus en sortir. Quel dommage ! De notre côté, outre les promenades, nous avons passé de nombreux moments juste posés à profiter de la nature, du climat et de la compagnie, à nous raconter de belles histoires et anecdotes, le tout généralement sur fond musical, puisqu’il y a toujours au moins une source de musique un peu partout, tout le temps (et si joyeuse!). Raconter de belles histoires, c’est une jolie qualité des voyageureuses, grand-es collectionneureuses de moments et d’expériences. Cela donne foison de récits drôles, touchants, beaux ou intéressants, qu’on se partage comme on échange des vignettes panini. Parce qu’on aime autant les entendre que les raconter, et qu’on se fait ainsi voyager pendant nos voyages, pour ouvrir toujours plus d’horizons, découvrir d’autres perceptions et de nouveaux mondes. Bref, j’étais définitivement en excellente compagnie.

Tour de lac
En balade avec notre pote AJ
Incroyable street food
On a aussi revu Nils, du trek de l’Acatenango

A un moment, au bord du lac, nous avons été rejoint-es par Ruggero , qui était venu parce que… il avait entendu parler italien! En effet, Peu d’italien-nes font de longs voyages sac au dos dans ces pays. Giorgia et Felice avaient notamment été content-es de me rencontrer car cela leur permettait de parler leur langue, après des mois sans contact avec leurs compatriotes. Ruggero a passé un peu de temps avec nous puis nous nous sommes séparé-es à notre départ, mais on le retrouverait quelques jours plus tard, dans le nord du pays.

Pause jus de fruit
Depuis le bateau
Bonheur
Tour de lac

Parmi les autres moments qui nous ont marqué lors de notre séjour au bord du lac, il y a eu cette fois où on a commandé un petit déjeuner avec des œufs dans un restaurant, où le serveur nous a dit ok, puis où on a attendu. Ce n’est que lorsqu’il aura été livré d’une cargaison d’oeufs, environ une demie-heure plus tard, que nos assiettes auront fini par arriver. Si je me rappelle bien, j’ai entendu ce même serveur dire “un momento” une douzaine de fois, à différent-es client-es. Il s’agirait de ne pas trop se presser ! Nous avons eu nous avons également eu un droit à un épisode Netflix dans le dernier petit village que nous avons visité, en fin d’après-midi. Là, nous avons eu l’occasion d’observer un groupe d’adolescents chauffeurs qui se comportaient un peu comme s’ils étaient un gang de motards. La musique était forte, l’attitude bravache, quelques dérapages contrôlés et des airs provoc et moqueurs. Mais ceci… en conduisant des tuk-tuk !

Tour de lac
Chill en bord de lac
Ce qu’on trouve au petit magasin
Un resto de village, plutôt classe
Miammm

C’était bien sûr assez cocasse et cela prête à sourire. Mais il ne faut pas que ces moments amusants fassent oublier cette réalité grave : le travail des enfants, qui est encore malheureusement extrêmement répandu. Au Guatemala, nous en avons maintes fois fait l’amère expérience. De nombreux enfants ne vont pas à l’école (beaucoup de personnes ne parviennent pas à compter sans calculette), mais exercent tout type d’activité en vue de rapporter un peu d’argent à la famille. Un jour, une toute petite fille d’à peine quelques années a cherché à emprunter l’un de nos appareils photos pour photographier sa grand-mère, et ensuite nous faire payer cette photographie. Vente de friandises dans la rue, conduite de tuk-tuk, service au restaurant, vente de tickets pour les transports, les tâches dédiées aux enfants sont nombreuses. On pouvait aussi observer qu’elles évoluaient avec l’âge, l’expérience permettant apparemment de monter en grade dans l’importance de la fonction exercée.

En amour avec le street art de San Pedro de Atitlan, les oeuvres du peuple, par lui et pour lui, sans intermédiaire
Art sur poteau
Street art
Street art
Street art
Street art en langue indigène locale
Street art
Street art
Street art
Street art
Street art
Street art
Street art

La prochaine étape après Atitlan était le centre du pays, pour aller voir les cascades et piscine de Semuk Champey. Là, nous avons pu comprendre à quel point les locaux voyagent peu d’une zone à l’autre du pays, parce qu’il n’était pratiquement plus possible de trouver des bus collectifs faisant ce trajet en une seule traite. La seule option viable était de prendre des “shuttles” pour touristes, qui coûtent sensiblement plus cher mais font le trajet d’un seul coup (bien sûr toujours assez lentement, vu l’état des routes). C’est à la fois positif (authentique, pas trop de touristes, mode de vie local préservé), à la fois un peu dommage (mauvaises infrastructures, assez coupé du reste du monde, beautés naturelles peu explorées).

Depuis l’hôtel à Lanquin
Vue sur la jungle, ça foisonne !
L’hôtel tout coloré
L’hôtel

Nous nous sommes retrouvé-es dans un petit village avec vraiment pas grand-chose, hormis quelques hôtels et restaurants pour les touristes. Le reste étaient entre autre d’innombrables kiosques à chips et soda, ou des bords de route où sèchent du poivre et de la cardamome, embaumant la rue. il y a une seule et majeure attraction dans ce coin du pays, qui se trouve dans un parc juste à côté du village. On y arrive en 4×4, debout à l’arrière du pick-up et s’accrochant comme à sa vie à une barre en métal soudée au camion. La route est extrêmement accidentée, pour penser qu’il s’agit d’une des attractions naturelles principales du pays, mise en avant dans les guides et mentionnés partout dans les agences. Encore une fois, cela montre que le tourisme n’est pas très massif par ici. Nous avons fait le trajet en 4×4 uniquement avec des localaux ; ça a été l’occasion de plusieurs éclats de rire et quelques échanges sympathiques.

Le trajet avec les femmes du village
On s’accroche, car ça secoue !

Les cascades en elle-même étaient totalement saisissantes ! Une grosse rivière s’écoule et tombe avec grande puissance puis s’enfiler soudainement dans un trou la faisant passer sous terre pour en rejaillir plus loin. Par-dessus se sont formés des petits bassins, autant de piscines d’eau tiède qui restent bleu turquoise même en saison des pluies et après un fort orage. La baignade fut absolument charmante, et même si nous n’étions pas seul-es, il n’y avait quand même vraiment pas beaucoup de monde. Quand je pense aux jolies rivières au Tessin qui sont littéralement prises d’assaut, je ne peux qu’être reconnaissante d’avoir déniché un petit coin aussi beau. Plus tard, nous sommes également monté-es au Mirador, petite balade escarpée à travers la jungle nous permettant d’arriver à un très beau point de vue sur les cascades.

La rivière arrivant à toute puissance s’engouffre sous terre via un trou
Les cascades et piscines naturelles de Semuk Champey
Vue depuis le Mirador

Trois des mes moments préférés durant ce voyage ont eu lieu à Lanquín, le village près de Semuk Champey. La première fois, on mangeait dans un restaurant de localaux; des tortillas, du poulet et du riz (comme souvent). Le restaurant était plein sauf une table, allez savoir pourquoi il n’y avait que des italien-nes ce soir là. Il était 20h, cela faisait 2h que le soleil était couché. Arrive un nouvel italien qui demande à la patronne d’accueillir 16 personnes. Elle le regarde avec circonspection pendant quelques secondes, puis lui répond “5”. Il insiste un peu, elle répète ” 5″, impassible. Il a fini par abandonner et partir. Il était 20h, sa journée de travail était finie, et personne n’allait la faire travailler plus que de raison, ou plus que le maximum nécessaire. Une scène comme si on était au théâtre.

Plat basique dans le restaurant de la dame imperturbable

A un autre moment, le téléphone d’une des serveuses du restaurant a sonné, son petit ami l’appelait. Comme la sonnerie était une musique du coin, j’ai d’abord cru qu’elle mettait simplement de la musique, pour l’ambiance. Au moment où elle répondait, je lui ai donc dit “laisse, laisse !”, pour en entendre plus. Ensuite, une fois revenue de son appel, elle était morte de rite pendant au moins dix minutes à cause de ce malentendu ! C’était d’autant plus sympa et plein de fraîcheur qu’elle ne parlait pas très bien espagnol (mais probablement seulement son dialecte indigène) et que beaucoup de l’interaction se jouait aux mimiques et aux sourires. Un moment très simple et touchant, de vrai échange à travers les différences. Le dernier chouette moment à Lanquín fut un peu inattendu. Alors qu’on chillait sur la terrasse de notre hôtel à 23h, un coq a soudain lancé un cri à travers l’obscurité. Alors, une vingtaine d’autres coqs des environs se sont mis à chanter et se répondre pendant une dizaine de minutes, dans le noir complet. Encore une scène très marrante, comme tirée d’une pièce de théâtre un peu absurde.

Balade dans la jungle
Depuis le Mirador

Après plus d’une semaine, je me suis plus ou moins enfin habituée à ne pas jeter le pq dans la cuvette de toilette mais dans la poubelle prévue à cet effet (c’est la norme dans de nombreux pays hors de l’Occident, mais très difficile de modifier rapidement une habitude si profondément ancrée !). Dans ce pays où la vie s’arrête vers 18h, les enfants ne vont pas à l’école mais manient des smartphones, les hommes portent des chapeaux de cow-boys et les femmes des tenues fleuries complètement différentes selon la région du pays, dans ce beau pays vous l’aurez compris car je l’ai assez répété, j’ai trouvé une grande authenticité, des personnes simples, gentilles et chill. Parmi les aspects marquants, on note bien sûr la lenteur de la vie (qui n’est pas paresse !), la musique omniprésente, mais malheureusement aussi la drague plutôt lourde avec un arrière-goût menaçant (en particulier le soir, si on porte des vêtements courts, et ce même si on est en présence d’un homme). La violence est aussi plus présente que ce à quoi je suis habituée, on voit par exemple des militaires ou securitas armés, ou des panneaux à l’entrée de villages indiquant que la population se protège face aux attaques.

Vie quotidienne à Lanquín
Ça a l’air de rien mais n’avait une sauce au chocolat quand même

Parmi les sujets de discussion récurrents avec Giorgia et Felice, la question de la liberté a souvent refait surface. Cette liberté absolue du voyage où on ne dépend de rien ni personne et qu’on fait ce qu’on veut, quand on le souhaite, sans aucune pression autre que celles qu’on se choisit. C’est vraiment une expérience très magique, d’être libre de pouvoir chercher la beauté que ce monde a à offrir, sous toutes ses formes, sans contrainte aucune. On prend plus de risques que dans sa vie quotidienne, et on renonce au confort auquel on est habitué-e, certes, mais l’aventure en vaut mille fois la peine. Comme dit Giorgia, on observe et analyse les situations, et on s’adapte afin de ne pas se mettre en danger mais aussi de ne pas heurter les localaux ou mettre une distance entre nous. Felice a dit qu’en voyageant il a appris ce qu’il appelle le “pouvoir du sourire”, qu’avant ca il ne souriait clairement pas à autant de monde dans sa vie de tous les jours. C’est très beau. Et c’est vrai que c’est le secret d’un contact réussi. On peut parler des langues différentes, venir de cultures d’une toute autre partie du monde, avec un sourire franc on peut créer un vrai contact avec l’autre. On lui montre en quelque sorte qu’on est quelqu’un-e de bien et qu’on se ressemble, au fond.

Soleil, nature, voyage… What else?
Baignade à Semuk Champey

S’il est beau de pouvoir profiter du voyage sous tous ses aspects, je ne peux cependant jamais oublier quel privilège c’est de justement avoir cette chance. Pouvoir prendre même juste trois semaines de vacances (voire des mois d’évasion), avoir les moyens financiers de partir loin, avoir pu apprendre d’autres langues pour pouvoir communiquer. Je n’arrête pas de me répéter que si les gens sont pauvres ici, c’est parce que nous sommes riches là-bas. Il est primordial de toujours s’en souvenir. On voit comme l’Asie est riche, variée, différente de l’Occident, on observe les myriades de cultures indigènes du Canada jusqu’à la Patagonie et leurs modes de vie, traditions, rituels, langues… à quoi ressemblerait les Amériques si nous ne les avions pas colonisées, exploité leurs richesses, oppressé et massacré leurs peuples? Je me le suis souvent demandé. Sans le capitalisme, ce monde serait si différent, plus riche encore. C’est toujours aussi navrant de constater tout ce qu’on perd et détruit à cause de la propriété privée des moyens de production, qui permet à une minorité d’exploiter la majorité tout en détruisant la planète. Eh oui désolée… vous n’alliez tout de même pas échapper au discours anticapitaliste juste parce que je suis en voyage ! Le capitalisme ne prend pas de vacances, et le voyage me rappelle constamment aux réalités de notre monde. Mais comme vous avez vu, ça ne m’empêche pas de prendre du bon temps malgré tout 😉

Semuk Champey

Je vous écris actuellement depuis le paradis sous la pluie, au Belize. C’est gentiment la fin de mon voyage et ici aussi j’ai pu voir de sacrées merveilles, même si j’ai finalement été rattrapée par la saison des pluies qui m’avait jusqu’alors relativement épargnée. Si j’y arrive, je ferai un dernier post pour vous parler des ruines maya à Tikal et aussi du Belize, puis la vie quotidienne reprendra!

Forêt tropicale et palmiers for ever !

Tant de nouvelles expériences, amitiés, réflexions en si peu de temps! Et encore et toujours cette question que j’aime me poser régulièrement, comme une invitation à continuellement changer, apprendre, évoluer: c’est quand la dernière fois que j’ai fait quelque chose pour la première fois? Et toi?

Mes fantastiques partenaires de voyage !

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